sans connaissance

Dans ce roman à la langue crue, détonante et pleine d'humour, Éric McComber nous raconte l'histoire tragi-comique d'Émile Duncan, de son enfance dans le Montréal-Nord des années 1970 - violence et « granolisme catho-colonisé » - jusqu'à sa plongée dans la sensualité brute et l'alcool, entre neige sale et ciel bleu.
— David Rochefort

mercredi 10 octobre 2007

Tokyo Tulip


O hayou gozaimasu
Tokyo Tulip

Sayaka
Sortir le lit sous la nuit sucrée
S’étendre sous le vent
Sous le sel et sous le sable
Que les étoiles nous conjuguent

Ta peau est dure
Ta main est rude

Tokyo Tulip
Hold me down
Hold me down
Hoya sumi nasai
Tokyo Tulip

Orion brille
Through your jet black hair

Porterons la mer effondrée sur nos échines
En vagues qui crashent
Venues de l’autre monde
Nous offrir leur dernier souffle
S’écraser contre nous

La lumière se lève
Hoya sumi nasai
As-tu froid ?

Fais-toi buto,
Fais-toi kabuki
Joue moi les lentes amoureuses
Tokyo Tulip
Serre toi contre mon ventre
Enroule toi

Oui, Tokyo Tulip,
Tu comprends ces choses
Pas les mots
Le sens

Tu comprends enfin ma langue
Ma langue le long de tes lèvres
Ma langue en cuiller
Qui te soulève

Tu gémis en japonaise
Rentrée, rentrée, rentrée,
Honteuse, modeste, cachée, puis…

Tu gémis
Tu pleures, presque
Tu hurles

Tokyo Tulip
Te quiero Sayaka
Te quiero capullita
Te quiero señorita
¿ Entiendes ?
I fancy you
You delight me
I want you
I want you with me
I want me with you
Te quiero Guapa
Te quiero mucho
Dejarme darte besitos
Dejarme carecer tu tortilla
Te mamo, te mamo suave

Je te veux sur moi
Je me veux sous toi
Je te veux sucrée
Je te veux salée
Je te veux sous les étoiles
Je te veux sous le soleil
Je te veux dans les vagues vertes
Je te veux Tokyo Tulip

Elles ?
Non, je les veux pas elles
Je te veux toi

I want you
I want you outside
Dehors
Avec le lit dehors, sous les étoiles, avec le parfum de la citronnelle huilant nos épaules et dans ton dos l’odeur ensoleillée de l’après-midi caribéen et dans l’air les épices, orchideas, pájaro del paraíso, jazmin mariposas
Je te veux avec les oiseaux tout autour
Pépiant quand les premiers rayons dégoulinent, brisent la muraille des ténèbres, la dernière ligne de défense de la nuit
Je te veux quand les premiers espions du soir reviennent en rampant dans les crevasses et que les ombres cessent de tournoyer, et se rejoignent plutôt, étirant leurs longs doigts, les unes vers les autres, se touchant presque, puis, se serrant déjà, s’embrassant, deux par deux, quatre à quatre, cent par cent, se vautrant bientôt les unes contre les autres, pour ne plus faire qu’une, pour se fondre en un royaume, une idée, un tout, un monstre, un joyau, la nuit…
Tokyo Tulip that’s when I want you
I want you inside
Je te veux quand le sommeil s’empare de moi
Quand mon œil faible ferme ses portes
Je te veux avec ta moue curieuse, étrange, incrédule
Alors que tu m’épies de dessous ton front
Je te veux aux travers des larmes quand tu me salue sur la terrasse et que je t’embrasse par la fenêtre du véhicule,
la gorge nouée et le moteur qui embraye, qui gronde…
Tokyo Tulip

Je vais descendre au bord de l’eau
Avec ma guitare au bord de l’eau
Je vais t’attendre au bord de l’eau
Viens me trouver
Viens me trouver

Malecón
Malecón

A siete de la noche
Llega con migo
A Malecón
Caminaremos sobre las aceras
Malecón mi guapa
With your hand on my waist
Malecón
Oh Malecón

Avec tes cheveux charbon
Avec ta peau corail
Avec tes yeux inquiets
Et tes silences nippons
Et le phare qui nous surprend
À se regarder

Toi
Aux pupilles si noires
Que la nuit les envie
Même la vraie
La vraie nuit
La nuit d’avant les Colomb

La nuit d’avant les Cortez
Avant la nuit des temps
Avant la nuit des Rois
La nuit de juste avant
La nuit de la veille
La nuit éveillée
La nuit dernière
La nuit ultime

Avant la mauvaise aurore
Avant l’aurore double
L’aurore aux deux soleils

Avant le lever de la noirceur
Avant le vol des croix d’acier
Avant que le ciel ne s’emplisse
De leurs charognards rutilants

Avant Madrid et Guernica
Où tout s’éteindra même la noirceur
Avant avant la nuit d’avant
Avant la lumière des Lumières

Avant le jour des temps modernes
Avec leurs procédés cyniques
Avant Kiev, Vichi, ou Alger,
Treblinka, Capetown, Leningrad,
Kinshasa ! Oh Kinshasa !
Luanda, Sierra Leone,
Srebrenica, Jerusalem,
Bophal, Sayaka, Bophal !
Avant la nuit, Nagazaki
Avant la nuit,
José Martí
Avant Che
Lumumba
Mahatma
Frederick
James
Knüt
Ernest
Louis-Ferdinand
Charles


Les Arménies, les Algéries,
les Tchétchénies et les Ukraines
Avant la grande nuit Africaine
Les nuits d’Afriques, Oh, Sayaka,
Nuits noires d’avant les choléras

Avant après les Allendes
Les Bolivar et les Fidel,

Ce soir ma belle, serre-moi, serre-moi
C’est une de ces nuits hors du temps
Une de ces nuits d’avant les temps
Une de ces nuits qu’on se rejoue

Après




—————
© Éric McComber, 2000

2 commentaires:

Anonyme a dit…

I want you deep inside.

& a dit…

Fire.
Oh my fire.
Je me souviens.